Good Move ne freine pas la gentrification de Bruxelles, bien au contraire !
L’un des buts de Good Move était de freiner l’exode des classes moyennes hors de Bruxelles et d’en attirer de nouvelles, plus aisées (voir notre interpellation régionale).
Philippe Close, à Bruxelles Ville, se réjouit de son bon bilan, notamment du piétonnier qui aurait selon lui contribué à attirer plus d’habitants et d’entreprises dans le centre ville.
L’article reproduit ci-dessous montre que cela s’inscrit dans le contexte désormais connu de l’exode des classes moyennes, vers la périphérie mais aussi vers le centre ville (où les transports en commun sont abondants, avec ou sans Bad Move), et que l‘augmentation des prix qui en résulte pousse les classes populaires vers la sortie.
Le « succès » de la politique de M. Close contribue donc à la gentrification de Bruxelles. Mais sans doute était-ce l’effet recherché … (?)
Extrait de la page Linkedin de Bruscope :
À Bruxelles, environ 50 % de la population appartient aux classes populaires, 30 % appartient aux classes moyennes et 20 % appartient aux classes aisées (Berns et al., 2022). Notons que l’encrage résidentiel des classes aisées dans le sud et l’est de la ville est une caractéristique durable de la géographie sociale de Bruxelles , celles-ci ayant un rapport fonctionnel à la ville, s’y rendant pour les affaires, les sorties, les lieux culturels, les commerces, etc. Les quartiers populaires sont quant à eux cinq fois plus denses que les quartiers aisés. Ils sont caractérisés par une majorité de logements anciens en mauvais état, souvent mal entretenus et ayant des problèmes d’humidité, d’isolation ou d’installation électrique. La plupart des résident·e·s y sont locataires (deux ménages sur trois) et louent leur logement auprès de bailleurs privés (Van Criekingen, 2021).
On a observé ces dernières années une augmentation des résidents appartenant à la classe moyenne dans les quartiers centraux populaires de Bruxelles. Cela a entraîné une pression supplémentaire sur les prix des logements abordables dans ces quartiers, et, finalement, un rétrécissement des possibilités d’insertion pour les familles aux revenus plus modestes. Aujourd’hui, la demande des ménages aux revenus inférieurs, mais aussi moyens, semble se déplacer de manière plus concentrée vers le « croissant pauvre ». Cette partie de la ville est donc à son tour mise sous pression, en y logeant de plus en plus d’habitant·e·s « captif·ve·s » de leur logement (les nouvelles annonces étant devenues trop chères), ou parfois même repoussé·e·s vers la périphérie par la hausse des prix (De Laet, 2018; Dessouroux et al., 2016).
Cette augmentation de la demande dans les quartiers de première couronne s’est accompagnée d’une forte production de logements neufs haut de gamme. Entre 2004 et 2015, les deux tiers des nouveaux logements construits sont l’œuvre de promoteurs privés, dont à peine un sur cinq est revendu à des propriétaires particuliers (et une minorité de propriétaires-occupants) (Dessouroux et al., 2016).
Selon Mathieu Van Criekingen, enseignant chercheur en géographie à l’ULB, cette activité immobilière élevée dans les quartiers centraux est le résultat de trois principaux facteurs : l’intérêt qu’ont les petits ménages actifs sur le marché locatif pour la centralité de ces quartiers, un recentrage de l’action publique vers ces quartiers par le biais d’une politique de rénovation urbaine visant à améliorer leur attractivité et, enfin, par les mécanismes de plus-value foncière et de financiarisation (Van Criekingen, 2021).